Le spectacle et les joutes technico-tactiques de ce dimanche soir teinteront les saveurs particulières des effleurements de nos papilles gustatives. Le menu charnu n’oubliera aucunement ni le Ndolé, ni l’Atiéké… Comme le disait Camfoot déjà en 2002, c’est que la rivalité et la lutte pour le leadership de ces équipes a franchi les méandres du temps et de l’espace pour s’élever au rang de duel pour l’honneur; honneur qu’on garde sauf ou qu’on salit à jamais… en attendant la prochaine occasion de le laver. Ces rencontres s’inscrivent dans l’ordre de ces frénésies humaines que les mots n’expriment pas. À l’intérieur de ces rencontres, dans ce que l’on peut appeler de « match dans le match » se vautrent des combattants épiques, qui donnent le ton de ces confrontations. Revenons sur ces moments savoureux qui ajoutent du piment à l’histoire des chocs Cameroun – Côte d’Ivoire. Restons sur deux exemple, Youssouf Fofana – Roger Milla, puis Achille Webo qui vole la vedette dans le duel Samuel Eto’o – Didier Drogba
Youssouf Fofana, le “Diamant Noir” qui voulait le scalp de Roger Milla
Dans les années 1980, alors que Roger Milla imposait sa loi avec élégance et malice, un jeune ailier ivoirien explosait : Youssouf Falikou Fofana, surnommé le “Diamant Noir”. Rapide, technique et prometteur, il a évolué AS Cannes puis à AS Monaco. Il incarnait l’espoir d’une génération ivoirienne prête à défier la domination camerounaise.
Lors de la CAN 1984, organisée en Côte d’Ivoire, les Éléphants recevaient les Lions à Abidjan en phase de groupes. Avant le match, Fofana et ses coéquipiers (Zahoui, Pascal Miézan, Monguéhi) promettaient publiquement “la peau du lion” aux Ivoiriens. La tension était à son comble puisque chacune des deux équipes avait besoin d’une victoire pour avancer.
Mais sur le terrain, ce fut une démonstration camerounaise : 2-0, avec des buts de Bonaventure Djonkep et… Roger Milla lui-même ! Fofana, malgré son enthousiasme, n’a pas pu inverser la tendance.
Il faut dire que tous les médias français n’avaient d’yeux que pour Youssouf Fofana. Il était dans une forme resplendissante. Et les Lions, dans les vestiaires avaient paré de ce gamin et de la manière de défendre contre lui. Une anecdote raconte même que le défenseur camerounais Isaac Sinkot, entré en cours de jeu, après que le petit ait techniquement dominé son côté, a neutralisé Fofana en lui glissant en jargon camerounais : “J’ai un fils comme toi, si tu tiens à ta santé, évite de me manquer de respect.” Résultat : Fofana muselé, et les Lions qualifiés pour les demis.
Deux ans plus tard, en demi-finale de la CAN 1986, Milla récidive avec l’unique but du match (1-0). Fofana, présent dans l’effectif ivoirien, voit encore les Lions triompher. Ce duel symbolise l’impossibilité du passage de relais. Fofana, l’ambitieux challenger, n’a jamais vraiment pu prendre le dessus sur le vieillissant Roger Milla.
Pierre Achille Webo, l’Intrus d’Abidjan 2005
Ah, le fameux match du 4 septembre 2005 à Abidjan ! Qualifications pour le Mondial 2006 : tout le monde attend le choc au sommet entre Didier Drogba et Samuel Eto’o, les deux superstars africaines au zénith. La Côte d’Ivoire, leader, n’a besoin que d’un point pour qualifier historiquement les Éléphants à la Coupe du Monde. L’ambiance est sans pareille au stade Félix-Houphouët-Boigny, avec une fête prévue pour célébrer la qualification.
Mais voilà, l’intrus s’appelle Pierre Achille Webo. Cet attaquant, alors à Osasuna, va voler la vedette de manière insolente : il inscrit un triplé (30e, 44e et 87e minutes) pour une victoire 3-2 des Lions ! Drogba marque bien un doublé (38e et 47e), mais c’est insuffisant. Webo lobe Kolo Touré pour le premier, profite d’une combinaison avec Eto’o pour le second, et scelle le score en fin de match sur un centre de Gérémi Njitap.
Eto’o, pourtant attendu comme le héros, passe presque inaperçu à côté de ce festival. Les Camerounais gardent l’espoir de qualification… jusqu’au penalty raté de Pierre Womé contre l’Égypte un mois plus tard. Mais ce jour-là, Webo devient “l’homme d’Abidjan”, le trouble-fête qui gâche la fête ivoirienne et entre dans la légende de la rivalité alors qu’on ne l’attendait pas.
Qui sera l’intrus de ce Côte d’Ivoire – Cameroun ?












